La KTM Super Adventure 1290 m’a réconcilié avec les trails

KTM 1290 Super Adventure
par Adrian

Il y a beaucoup de trails qui tentent de tout faire. D’être à la fois performants, confortables et capables de rouler partout. Jusqu’à maintenant, je les trouvais tous trop patauds, trop rigides ou pas assez adaptés au tout-terrain. Et rien d’étonnant à ça : on leur demande d’être bons dans des registres trop éloignés. Mais avec la KTM Super Adventure 1290 j’ai découvert un équilibre parfait.

Temps de lecture : 3 minutes

Pour la première fois de ma vie, j’ai eu un entretien avec un groupe d’ingénieurs. Ça s’est passé au cours d’une visite de l’usine Dunlop, à Montluçon. Autour de la table, il y avait les cerveaux qui développent les pneus motos de la marque. Cinq cervelles capables d’analyser des chiffres à la vitesse d’un ordinateur, qui maîtrisent la « simulation par éléments finis » et qui placent des mots de 6 syllabes dans chacune de leurs phrases. Le tout, en étant aussi expressif qu’un chien qui regarde un mur. Autant dire qu’avec mon demi-cerveau et mes 7 mots de vocabulaire, je me sentais comme une poule dans un chenil.

Cela parce qu’elle réunit des caractéristiques qui étaient jusqu’alors opposées.

Heureusement, on a réussi à établir une certaine connexion au moment où je leur ai demandé qu’elle était la moto la plus difficile pour développer des pneus. Leur réponse a été unanime : la KTM 1290 Super Adventure.
Cela parce qu’elle réunit des caractéristiques qui étaient jusqu’alors opposées.

Une puissance de sportive, un pneu de petit roadster

160 chevaux. 14,24 mkg. Ça, OK, on connaît. Ce sont des performances qui la placent dans le haut du panier des moteurs de la production. En revanche, cette puissance sur un pneu-arrière en 170/60, c’est pas OK. C’est plus étroit que celui d’une Yamaha MT-07, qui est moitié moins puissante. Et encore, ça c’est pour le modèle S, plus typé route. Je vous parle même pas du modèle R, qui est fait pour rouler dans la terre. Autant dire que ça fait des nœuds aux cerveaux des ingénieurs qui tentent de développer des pneus capables d’encaisser une telle puissance, sur une si faible surface.

Un pneu arrière plus étroit que celui d’une MT-07… Mais avec deux fois plus de puissance

Et au mien, la première fois que j’en suis descendu. Je me rappelle juste être resté au moins 5 minutes devant la moto, sans rien dire. Je vous jure que je n’avais jamais vécu ce qui venait de se passer, sur aucune machine. Et je ne comprenais pas comment un gros trail pouvait m’avoir fait ça.

Durant les 20 minutes qui venaient de s’écouler à son guidon, j’avais :

Accroché les 200 km/h dans un confort princier (on était sur une autoroute allemande)
Pris une courbe à 160 km/h sans le moindre mouvement de châssis parasite
Déclenché une roue arrière sur l’angle en sortie de virage sur le cinquième rapport – oui, Le. Cinquième. Rapport.
Pas transpiré une seule goute.

Et tout ça avec des valises.

Schizophrénie

Aucune moto au monde ne m’avait procuré des sensations aussi incompatibles jusqu’alors. Mélanger un confort (avec un écran TFT et une électronique de pointe), une facilité (notamment des commandes très souples), avec des performances moteur démonaiques (héritées de la 1290 Superduke) et une stabilité à toute épreuve, je ne pensais pas cela possible.

elle a été conçue dans une totale schizophrénie

Et en faisant quelques recherches sur la machine, j’ai vite compris qu’il n’y avait pas de secret : elle a été conçue dans une totale schizophrénie. Pour la faire courte, les pilotes essayeurs l’ont à la fois développée en short (pour déceler notamment les problèmes de chauffe des anciens modèles) mais aussi en course, au milieu de sportives (c’était au Pannoniaring en Hongrie et la moto a terminé troisième…)

C’est comme si KTM avait réuni ses pilotes de développement « touristes », qui roulent en short et partent en vacances en camping-car et leur avait dit : « les gars, vous avez carte blanche, faites une moto pour les gens comme vous, qui aiment voyager ». Ensuite, ils ont réuni leurs pilotes de développement « gaziers », qui font des chronos pour savoir qui est le plus rapide pour aller à la photocopieuse et leur ont dit : « les gars, vous avez carte blanche, faites une moto pour les gens comme vous, qui aiment rouler vite. » Sans leur dire qu’ils bossaient en fait sur la même moto.

Le package électronique est l’un des plus poussés du moment.

Sauf qu’au lieu de créer une sorte de Frankenstein, qui tenterait de détruire quiconque s’assoit dessus, ils ont créé une moto d’une facilité incroyable (du moment que vous faites plus d’1m75). Le package électronique est l’un des plus poussés du moment. On retrouve par exemple un ABS en virage, qui régule la pression que vous exercez en fonction de l’inclinaison de la machine. Ou encore des modes moteur et suspensions qui font passer la moto d’une machine capable de vous faire voyager pendant 8 ans (bien aidée par une selle confortable et une bonne protection), à une moto capable de suivre n’importe qui sur route (avec notamment une garde au sol excellente).

Elle vous donne l’impression d’avoir attrapé la petite étoile qui clignote dans Mario.

Les suspensions sont un exemple du genre, aussi à l’aise en tout-terrain que sur route, quelle que soit l’allure. Le freinage est dosable et puissant. En fait, tout est facile à son guidon. Elle vous donne l’impression d’avoir attrapé la petite étoile qui clignote dans Mario.

Je crois qu’elle est parfaite

Le problème, c’est quand il faut lui trouver des défauts. J’en suis personnellement incapable. J’ai beau chercher, je ne trouve rien de rédhibitoire pour moi. Elle est haute de selle, mais bon, autant qu’une Honda Africa Twin par exemple. Elle est lourde, mais moins que la plupart de ses concurrentes. Elle est moche, mais autant qu’un autre trail. Elle est chère, mais pas autant qu’une BMW R 1200 GS, qu’une Triumph Tiger 1200 ou qu’une Ducati Multistrada 1200…

Je suis incapable de lui trouver de réels défauts…

Peut-être à la rigueur, en prenant du recul, elle s’adresse plus à un public de connaisseurs. Si votre truc, c’est de rouloter tranquillou, sans vous préoccuper des performances, elle ne sera pas la meilleure. Ce n’est pas qu’elle n’en est pas capable, c’est juste que ce serait du gâchis.

Quelles sont les différences entre la version S et R ?

La version S est faite pour la route, avec des jantes en 17 pouces et des Pirelli Scorpion Trail II. Elle possède également un système de supports de bagages flottants. Alors que la version R hérite de jantes à rayons en 21 et 19 pouces, d’une fourche et d’un amortisseur non pilotés électroniquement avec un plus gros débattement. Elle possède également des protections pour la jeter par terre sans trop de scrupules. Pour l’ergonomie, la selle devient monobloc et la bulle est raccourcie.

Et par rapport à la BMW R 1200 GS ?

La GS est la référence du monde du trail. Aussi bien en termes de vente, que de confort et de facilité. Elle mise sur des choix techniques qui la mettent à part du reste de la production (un système de suspensions telelever, un moteur flat-twin…), ce qui fait qu’en termes de sensations, elle est aussi différente. Un peu trop pour moi, qui préfère le naturel de la Super Adventure...